Abus face à une définition large
On l’a dit, cette liste des métiers cruciaux et plus largement la souplesse accordée à certaines entreprises fait l’objet d’un bras de fer entre patrons et syndicats.
Les syndicats ont constaté que certaines entreprises ne respectent pas les règles, comme l’explique Robert Vertenueil, président de la FGTB : "Sous prétexte que certaines entreprises sont déclarées comme étant essentielles dans l’arrêté ministériel, elles considèrent qu’elles n’ont pas à appliquer les mesures de sécurité et d’hygiène. Donc on fait travailler les gens les uns sur les autres, sans gant, sans masque, ils se changent ensuite dans des vestiaires les uns à côté des autres. Et quand ils sortent de l’usine, s’ils croisent un policier sur le trottoir, il va leur dire : 'vous devez être à 1,5 m de votre collègue". Mais dans l’usine ils peuvent être l’un sur l’autre".
Le syndicaliste estime aussi que certaines entreprises détournent l’esprit de la liste des secteurs cruciaux en continuant de fonctionner. Par exemple, une entreprise qui fabrique des bougies continue de tourner, sans prendre de véritables mesures sanitaires, parce qu’elle relève du secteur de la chimie, qui est dans la liste. "On fait tout et n’importe quoi. On veut aussi maintenir des productions qui ne sont pas indispensables. Quand on est d’accord pour dire que les entreprises qui font des médicaments doivent continuer à produire, je ne suis pas sûr que cela veut dire qu’il faut continuer à produire des chaises en plastique" ajoute Robert Vertenueil.
Versus nécessités économiques
Mais pour les patrons, l’interprétation du texte de loi n’est pas du tout la même. Olivier de Wasseige, administrateur délégué de l’Union wallonne des entreprises explique, la loi impose des règles sanitaires mais ne dit pas qu’il faut stopper les activités économiques, à l’inverse : " La règle aujourd’hui, c’est d’essayer tant que faire se peut de continuer à travailler et qu’il y ait une activité économique. Il y a déjà un million de personnes au chômage temporaire. Il ne faut pas oublier que, à côté des secteurs essentiels, si on ne fait pas tourner les secteurs non essentiels, on va vers de réelles difficultés lorsque l’on va rentrer en phase de crise."
Pas question donc pour l’Union wallonne des entreprises de parler de production inutile ou futile : '"Ce sont des entreprises avec des carnets de commandes pleins et qui doivent avoir des rentrées pour payer leurs travailleurs. La situation est catastrophique pour les entreprises, de nombreuses entreprises estiment qu’elles ont une probabilité de faillite à court et moyen terme qui est importante vu les problèmes de trésorerie. On n’a pas le choix. Tant que la priorité est donnée à la santé des travailleurs, pour ceux qui on l’opportunité de travailler, il n’y a pas de raison qu’ils ne viennent pas travailler. Nous demandons qu’un maximum de personnes puissent continuer à travailler dans le respect des règles sanitaires."
Syndicats et patrons s’accordent tout de même sur un point, quel que soit le secteur, essentiel ou non, la première priorité de toutes les entreprises doit être la mise en place de mesures sanitaires pour éviter de contaminer les travailleurs et d’en faire des vecteurs de la maladie une fois sortis de l’entreprise.